PIERRE PELOUZET :

MÉDIATEUR DES ENTREPRISES

Le 23/05/2017

Pierre PELOUZET, vous êtes médiateur des entreprises, nommé par décret du Président de la République en janvier 2016, pour 3 ans. Vous assurez les fonctions précédemment exercées par le « médiateur des relations interentreprises » et le « médiateur des marchés publics ». Vous serez présent sur le Forum RESET. Dans cette interview vous nous rappellez le rôle de votre fonction, comment vous voyez l’essor de la médiation dans les entreprises, l’implication des entreprises dans le domaine de l’achat responsable, vous nous expliquez ce que sont vos actions dans le domaine de l’innovation et ce que vous pensez de ce que les entreprises et fournisseurs devraient faire pour renforcer leur confiance mutuelle…

Quel est le rôle du Médiateur des entreprises ?

Le Médiateur des entreprises, placé auprès du ministre de l’économie, remplit trois missions principales : il aide les acteurs économiques (privés et publics) rencontrant des difficultés contractuelles ou relationnelles à résoudre leurs différends de façon amiable ; il encourage l’adoption et la diffusion de bonnes pratiques dans les relations commerciales ; enfin, il contribue à faciliter l’innovation.

Le service de médiation, gratuit, est disponible sur l’ensemble du territoire, grâce à notre réseau de 60 médiateurs, dont 45 sont sont basés en régions, dans les DIRECCTE. Dans les jours qui suivent la saisine sur le site www.mediateur-des-entreprises.fr, un médiateur entre en contact avec le « saisissant » afin d’affiner l’objet de sa demande et les conditions dans lesquelles la médiation pourra se dérouler. La médiation vise ensuite à convaincre les parties de renouer le dialogue afin qu’elles s’accordent sur une solution commune, donnant lieu à un protocole d’accord signé.

Quel est votre sentiment sur l’essor que prend la médiation ?

Il y a 5 ans, nous traitions environ 100 dossiers par an. Aujourd’hui, plus de 1.000 par an ! Cette hausse importante et continue de l’activité s’explique d’une part par le fait que les entreprises commencent à mieux nous connaître. D’autre part, elles ont pris conscience de l’intérêt que représentent pour elles les « modes alternatifs de résolution des différends ». En effet, éviter une procédure judiciaire, c’est un gain de temps et d’argent pour l’entreprise. Mais pas seulement ! La vocation de la médiation est de rétablir un lien de confiance entre le client (qu’il soit privé ou public) et son fournisseur, afin qu’ils puissent continuer à travailler ensemble dans la durée. A l’issue de nos médiations, dans 75 % des cas les deux parties sont satisfaites de la solution trouvée.

Comment voyez-vous évoluer l’implication des entreprises dans les domaines de l’achat responsable ?

La charte et le label Relations fournisseur responsables (RFR), que la Médiation des entreprises porte avec le Conseil national des achats, sensibilisent l’ensemble des acteurs économiques aux enjeux des achats responsables. Je me félicite qu’aujourd’hui plus de 1.800 entreprises et acteurs publics aient signé la Charte RFR, tandis que 36 d’entre eux sont également labellisés Relations fournisseur responsables. Lancé en 2012, le label RFR s’inscrit dans le prolongement de la charte. Premier et seul label décerné par les pouvoirs publics en matière d’achat responsable, il distingue les entreprises ou entités publiques françaises ayant fait la preuve de relations durables et équilibrées avec leurs fournisseurs. Le label RFR est en train de s’ouvrir à l’international, et il répondra ainsi aux exigences de la nouvelle norme internationale ISO 20400 « Achat responsable », que nous avons contribué à élaborer.

Pour un fournisseur, travailler avec un client labellisé Relations fournisseur responsables, c’est non seulement un gage de confiance, mais c’est aussi la promesse d’une relation collaborative qui dépasse le seul lien contractuel, le labellisé s’engageant à exercer pleinement sa responsabilité économique et sociétale. Pour un grand groupe, une PME ou un acteur public, obtenir le label est la reconnaissance d’un travail d’évolution des comportements sur la durée, en interne à l’entreprise, et, plus largement, dans une dynamique qui entraine les partenaires et l’écosystème de l’entreprise. 

Vous traitez 1000 litiges par an. Qu’est ce qui selon vous pourrait renforcer la confiance des entreprises et entre acteurs ? 

Le plus important est de ne jamais rompre le dialogue. Il est courant qu’au cours d’une relation contractuelle surgissent parfois des difficultés : problème de livraison, de délai, de qualité, ou encore problème de compréhension sur un cahier des charges techniques de fabrication d’une pièce, ou sur le périmètre exact d’une mission de conseil. Dans ces moments-là, l’acheteur n’a rien à gagner à rompre le dialogue avec son fournisseur en se posant comme le seul décideur, de même que le fournisseur ne doit pas se retrancher derrière sa vision ou son « bon droit ». En médiation, nous ne nous affranchissons pas du droit, mais nous tentons de dépasser une vision qui ne serait que juridique, en cherchant l’intérêt collectif des partenaires d’affaires. Nous découvrons bien souvent que les points de vue n’étaient pas aussi éloignés que certains l’imaginaient ! N’oublions pas que nous sommes un pays latin… 

Nos médiateurs disposent de l’expérience et de la légitimité à même d’aider les deux parties à trouver un terrain d’entente. Ils sont neutres, et travaillent avec un seul objectif : aider à renouer le dialogue pour que les affaires reprennent, le plus vite possible… et le plus longtemps possible !

Vos missions couvrent également l’innovation, quelles sont vos principales actions dans ce domaine-là ? 

Ma mission a été étendue à l’innovation en 2014. Présente aux côtés de porteurs de projets innovants, particulièrement les plus petits d’entre eux, start-up, TPE ou PME, la Médiation des entreprises contribue par ses actions à améliorer le fonctionnement complexe de la chaine Recherche & Développement, innovation, et les relations entre les multiples acteurs qui la composent. Parmi nos nombreuses actions, la possibilité de saisir le médiateur sur tous les sujets freinant l’innovation, et notamment :

  • Le crédit d’impôt recherche et le crédit d’impôt innovation, la propriété intellectuelle, les différends entre TPE/PME et laboratoires publics ou privés, les différends avec les financeurs.
  • La mise en place d’un dispositif de référencement des cabinets conseil en CIR-CII.

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