ERIC DENOYER :

GÉRONTOLOGUE ET INGÉNIEUR SOCIAL

Le 29/01/2014

Éric Denoyer, vous êtes gérontologue et ingénieur social. Vous co-organisez le 13 février avec RSE PACA, un atelier innovant sur « Comment l’entreprise gère les employés qui vivent la dépendance autour d’eux? » Dans cet ITW vous revenez sur l’importance peu considérée que représente ce sujet pour les entreprises (14 % de la population active est concernée par la dépendance d’un proche) et de ce que vous allez y traiter. 

Expliquez-nous comment votre parcours vous a amené à la RSE…

En tant que gérontologue, je suis interpelé par le constat de l’augmentation inéluctable des personnes de plus de 50 ans qui seront confrontées tôt ou tard à la fragilisation liée au grand âge d’un(e) conjoint(e) ou d’un parent. Il y a 30 ans, nous nous préparions à la retraite ; aujourd’hui, nous voulons – et devons – nous préparer à aider un proche en perte d’autonomie.

Et en tant qu’ingénieur social, il me semble urgent de prendre en compte l’émergence de la question de la dépendance dans le monde de l’entreprise. La réalité est que cette dernière ne sait pas par quel bout aborder la question des salariés aidants. L’entreprise ne peut pas tout, certes. Cependant, elle peut s’interroger et agir sur les conséquences, en son sein, de cette dépendance : absentéisme, démobilisation, risques psychosociaux accrus, problèmes de santé des salariés…

Il s’agit donc de concilier vie privée et vie professionnelle, performance économique et performance sociale. Le lien avec la RSE se fait naturellement. La création de Tandemm Consultant en 2012 répond à ma volonté de promouvoir une démarche gagnant-gagnant entre salariés-aidants & entreprises. L’entreprise est faite de femmes et d’hommes qui sont sa force vive. Ils traversent parfois de longs moments de difficultés. Le rôle de l’entreprise est alors capital. Il vient comme un soutien pour ses salariés-aidants afin que l’activité globale demeure performante.

Mon propos est de mettre en lumière tous les points de rencontre possible entre le monde de l’entreprise et celui de salariés fragilisés par une situation d’aidant, non choisie.

Parmi les axes de notre action :

– Prévention de l’absence, de l’épuisement, du découragement et du manque de support des personnels en situation de « proche-aidant »
– Inflexion des coûts de dysfonctionnement liés à l’absentéisme/présentéisme ;
– Action sur un facteur de stress au travail et valorisation de l’engagement de la structure dans sa prévention des risques psychosociaux.

Pourquoi ce thème des salariés aidants est important pour l’entreprise ?

Ce sujet s’inscrit à la croisée des notions d’éthique, de légalité et de performance.

Si 14 % de la population active est concernée par la dépendance d’un proche, alors vos salariés, vos managers, vos entreprises le sont également. Il est temps d’en parler !

La question principale que se pose l’entreprise est « Est-ce mon rôle de gérer ce qui pourrait être considéré, après tout, comme relevant de la sphère privée ? »

Deux éléments contribuent à la réponse :

– Le premier touche à la réalité sociétale et à l’évolution des modes de vie. La porosité entre privé et professionnel est aujourd’hui avérée. La signature en juin 2013 de l’ANI, intégrant des éléments législatifs liés à la conciliation des temps et au rôle de l’entreprise, en est une des manifestations. 
– Le second élément tient à un raisonnement conjoncturel. Pour maintenir un niveau de performance optimal dans un contexte économique chahuté, l’entreprise ne peut se permettre d’ignorer la réalité de certains salariés qui, pour des raisons liées à l’accompagnement d’un de leur proche, ne seraient qu’à 50 % de leur potentiel. Et quel chef d’entreprise ne souhaiterait pas faire baisser d’un ou deux points son taux d’absentéisme ? Celui spécifique, lié à la dépendance peut faire l’objet d’actions ciblées, non encore initiées par les équipes RH parce que la réalité des salariés aidants est méconnue. 

Si vous ne savez pas répondre à la question : « Parmi vos collaborateurs, savez-vous combien ont mis leur évolution de carrière entre parenthèses, ont été en arrêt maladie, posé des jours de congés, aménagé ou réduit leur temps de travail pour aider un proche dépendant ? », alors soyez curieux et rendez-vous à l’atelier de 14h30.

Justement, de quoi allez-vous parler au cours de cet atelier ?

Du fait que le développement social est une opportunité d’amélioration de la performance économique.

La médecine du travail, via la parole du Dr CANINO du GIMS Marseille, nous dira s’il existe un débat entre l’entreprise et les représentants de la médecine du travail autour des salariés aidants. Elle posera un regard en matière d’aide à un proche dépendant, sur les demandes exprimées en termes de temps pour s’occuper de son proche dépendant, en termes de répit attendu par le salarié aidant, en termes de frein (réel ou ressenti) à en parler dans l’entreprise.

Les RH tiennent un rôle essentiel quant à la dynamique qu’elles doivent impulser en interne sur ce sujet. Un représentant de la fonction Ressources Humaines partagera son analyse sur le sujet et la réalité vécue par les équipes RH ainsi que leurs possibles réticences à oser l’innovation sociale. Pour ce faire, Béatrice Belin, membre de l’ANDRH Provence & DRH Eaux de Marseille Environnement témoignera de son expérience au sein d’une grande entreprise en évoquant la palette d’actions mises en œuvre pour accompagner la réflexion/action autour des salariés aidants. 

L’objectif de cet atelier : apporter une vision très opérationnelle sur un sujet d’actualité social et sociétal, les salariés aidants.

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